Comment quitter son entreprise au Japon : l’émergence des experts en démission
Au Japon, où les relations professionnelles sont strictement codifiées, il n’est pas toujours facile de quitter son entreprise. Les salariés nippons craignent les répercussions que cette décision pourrait avoir sur leur carrière et cherchent de l’aide auprès d’experts en démission. Une start-up japonaise, Exit, a fait de cette assistance à la démission sa spécialité. Fondée en 2017, elle accompagne les salariés dans leur démarche de quitter leur emploi et communique à leur place leur volonté de changement à leurs supérieurs hiérarchiques.
Le phénomène du « quiet quitting » au Japon
Le Japon n’échappe pas au phénomène de désengagement salarié, également connu sous le nom de « quiet quitting ». Les travailleurs japonais accordent désormais plus d’importance à leur bien-être personnel qu’à leurs aînés. Ils ne sont plus disposés à enchaîner de longues heures de travail sans repos, risquant ainsi le « karoshi », c’est-à-dire la mort par surmenage. Les salariés nippons réévaluent leur niveau d’exigence et cherchent un équilibre entre ce qu’ils donnent et ce qu’ils reçoivent de leur entreprise. Cependant, cela ne les rend pas plus épanouis et motivés pour autant, avec seulement 56% d’entre eux se disant investis dans leur emploi, selon un rapport du cabinet Korn Ferry cité par le quotidien Nikkei.
Les défis de la démission au Japon
Démissionner reste mal perçu dans une culture japonaise qui valorise la loyauté à vie envers l’entreprise. Cependant, les jeunes salariés, notamment ceux âgés de moins de 30 ans, sont de plus en plus enclins à sauter le pas. Ils sont souvent freinés par la peur de leur patron et les conséquences que cela pourrait avoir sur leur carrière. C’est là qu’intervient Exit, la start-up spécialisée dans l’assistance à la démission. Elle agit comme un intermédiaire entre le salarié et son employeur, informant ce dernier de la volonté de changement d’emploi du salarié. Un tel coup de pouce est facturé 20 000 yens, soit environ 133 euros, selon Al Jazeera.
L’entreprise connaît un succès croissant, recevant des milliers de demandes chaque année. Ce marché de niche prometteur a encouragé d’autres start-ups japonaises à se lancer dans le même domaine, témoignant de la tendance croissante des travailleurs japonais à repenser leur rapport à l’emploi.
L’expatriation comme alternative à la démission
Face à des conditions de travail jugées trop rigides et chronophages, de plus en plus de Japonais choisissent également l’expatriation pour améliorer leur salaire et leurs conditions de travail. Récemment, la plateforme Indeed a enregistré un nombre record de recherches d’emploi à l’étranger de la part de Japonais, selon The Economist. Les demandes de visa vacances-travail en Australie ont plus que doublé en 2022 par rapport aux années précédentes. Cette tendance inquiète les entreprises japonaises, qui font déjà face à une pénurie de main-d’œuvre en raison du vieillissement de la population locale.
Les motivations des jeunes Japonais à travailler à l’étranger
Les jeunes actifs japonais sont attirés par des salaires plus élevés à l’étranger. Par exemple, en Australie, un serveur dans un bar peut espérer gagner 21,38 dollars australiens (14,90 dollars) de l’heure, soit deux fois plus qu’au Japon, selon The Economist. Les conditions de travail jugées moins rigides et chronophages à l’étranger sont également un facteur d’attraction pour ces jeunes Japonais. Toutefois, ils restent pessimistes quant à une amélioration de la situation au Japon, avec seulement 14% d’entre eux estimant que les conditions pourraient s’améliorer dans un proche avenir, selon un sondage de la Nippon Foundation.
Au Japon, quitter son entreprise peut être un défi pour les salariés, confrontés aux attentes de loyauté et à une culture d’entreprise rigide. Des start-ups comme Exit offrent une assistance aux salariés démissionnaires en informant leurs supérieurs hiérarchiques de leur volonté de changer d’emploi. Cette tendance croissante témoigne d’une évolution des mentalités parmi les travailleurs japonais, qui accordent désormais plus d’importance à leur bien-être personnel et à l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle.